Écrire un scénario, c’est jouer une partie de Scrabble

Les idées, comme les lettres, apparaissent en pagaille, nous cherchons à les ordonner et on voudrait toutes les utiliser. Le K a de la valeur, mais on le gardera de côté pour un autre mot, comme on écarte une bonne idée pour en faire un court-métrage.

On aurait peut-être pu trouver mieux, mais un mot est apparu. Comment l’amener jusqu’au plateau ? À moins d’être le premier, il faut lui trouver des liens avec ce qui existe déjà. Qui peut me présenter qui, pour que mes envois ne restent pas lettre morte ?

Tout le monde aime, on nous flatte, mais il n’y a aucune possibilité de placement. Unique atout, la case centrale, mais la star est déjà occupée. La mort dans l’âme, on s’apprête à mélanger pour recommencer… Eurêka ! En collant les E bout-à-bout, on féminise le mot pour le caser. Ca tombe bien, France2 veut des héroïnes. Metoo fait vendre.

C’est alors que le jeu de lettres devient jeu de chiffres. Le gagnant du Scrabble est le meilleur comptable. On passe du Mac machine à écrire au mac machine à calculer qui prend dix pour cent. Il y a des lettres bien cotées, il y a des cases qui rapportent. Bien placé, le X double la mise ! À ce jeu-là, les mots les plus chers ne sont pas les plus beaux.

Les chiffres ont encore gagné mais la partie était serrée. On prend un bref recul pour observer tout ce qui est sorti et en tirer de vagues conclusions. On mélange les lettres en prononçant des formules magiques, et on glisse à nouveau la main dans le sac avec appétit, désir, curiosité, et toute l’impatience de recommencer.